Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Babelworld

20 juin 2022

Emilie Raducanu 19 juin 2021

Emilie Raducanu est psychanaliste et historienne.

Venu du milieu universitaire américain, un mouvement, la woke culture semble prendre de plus en plus d'importance en Europe et en France, qu'en pensez-vous ?

Je n'utilise pas ce terme ni celui de politiquement correct, d'ailleurs. Après la chute du mur de Berlin en 1989 a commencé un mouvement qui s'est tourné vers les luttes identitaires. Il y a plusieurs causes à cela dont les transformations profondes de la psychiatrie et l'étude des révoltes des minorités. Cela a commencé en 1973 avec les homosexuels qui ont demandé à ne plus être classifiés comme relevant d'une maladie mentale. Le triomphe de l'économie libérale signe également un mouvement de retour vers l'affirmation de soi plutôt que dans des luttes sociales. Au Etats Unis ce mouvement s'appuie sur la French Theory (Foucault, Derrida). Il faut y ajouter Edward Saïd, Aimé Césaire et Frantz Fanon qui sont réinterprétés dans un sens opposé à ce qu'ils écrivaient. Il y a un retournement avec une attaque du mouvement anticolonialiste français.

Publicité
Publicité
30 décembre 2021

Pierre André 1er janvier 2021

Pierre André est économiste et professeur au Cénacle. Il a 66 ans.

Pensez-vous que l'innovation est le moteur du capitalisme ?

Tout à fait. Le décollage de la croissance ne date que de 1820, en Europe, avec la révolution de la machine à vapeur. Ce sont les institutions qui ont permis que cette invention permette de nombreuses innovations. Il fallait la protection des droits de propriété, la concurrence et la diffusion des idées. En comparaison, la Chine qui avait antérieurement été le lieu de nombreuses inventions n'avait pas lee institutions nécessaires.

Est-ce que la concurrence favorise l'innovation contrairement à ce qu'affirmait Schumpeter ?

C'est très ambiguë chez lui car il n'y a pas de dialogue entre empirique et théorique. Ce sont les rentes de monopole qui favorisent l'innovation mais l'innovation est mauvaise pour ces rentes. Schumpeter avait compris que les innovations détruisent les anciennes technologies, la destruction créatrice, mais il était pessimiste sur l'avenir du capitalisme car les rentiers des innovations allaient bloquer les nouvelles innovations. C'est à l'Etat et la société civile de résoudre ce problème.

Que pensez vous alors de l'idéologie californienne qui refuse l'intervention de l'Etat suivant en cela les préceptes d'Ayn Rand ?

Je crois beaucoup au rôle de la société civile et de l'Etat. La liberté de l'individu est importante notamment pour l'innovation mais ne doit pas se transformer en volonté hégémonique sur les autres. Il faut des règles et un code social. La révolution des techniques de l'information a permit une forte croissance aux Etats Unis entre 1995 et les années 2000 mais les GAFAM sont devenues hégémoniques et ont bloqué l'innovation des autres. Cela a entraîné une baisse de croissance car les institutions américaines n'étaient pas adaptées à cette nouvelle économie. La croissance est la résultante de la combinaison entre technologies et institutions.

30 décembre 2021

Claude Dupuis 1er janvier 2021

Claude Dupuis est économiste et professeur d'Université.

L'innovation est-elle le moteur du capitalisme ?

Oui mais avant tout à cause des contraintes concurrentielles. Il est en révolution permanente comme l'a dit Marx avant Schumpeter en obligeant les acteurs à se réinventer de façon créative mais aussi destructive, facteur à la fois de dynamisme et de problèmes sociaux.

Mais les monopoles actuels des géants du numérique ne sont-ils pas un obstacle à l'innovation en écho au pessimisme de Schumpeter ?

Le pessimisme de Schumpeter était avant tout politique à cause de l'organisation de la société. Ces dernières décennies, un ensemble de mesures ont favorisé l'innovation comme les brevets ou les captures de rente. Le problème est que cela aboutit à un déclin de la productivité car une monopolisation des idées bloque le système économique. De plus, la suraccumulation du capital de certaines grosses entreprises n'est pas réinvestit car elles ne trouvent pas de projets aussi lucratifs que le leur.

Pensez-vous que l'idéologie californienne de la Silicon Valley a tenu ses promesses de croissance ?

Cette idéologie est d'abord une révolte anti-autoritaire, une aversion pour l'intervention étatique, une glorification de l'individu et une fascination pour la technologie. Il y a une convergence entre la culture hippie et les valeurs conservatrices américaines. C'est aussi une idéalisation de la figure de l'entrepreneur que l'on retrouve chez Ayn Rand. Elle se définit elle-même comme la créatrice d'un nouveau code moral basé sur la raison et prouvé par la logique dont on peut démontrer qu'il est vrai et nécessaire. Elle prend l'homme pour mesure de valeur. L'homme doit considérer la raison comme un absolu et son seul guide pour l'action. Il doit être seul juge de son action et viser son propre bonheur. Il ne doit pas décider pour les autres ni accepter que les autres décident pour lui. Chaque homme doit vivre comme une fin en soi et suivre son intérêt personnel.

 

 

Publicité
Publicité
Babelworld
Publicité
Archives
Publicité